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Lagl Land
21 novembre 2008

Les limbes de l'âge tendre.

Avez vous une soeur, ou un frère...?

Vous rappelez vous de temps en temps l'époque où vous viviez ensemble ?

Ca me parait extrèmement lointain. J'y pense très rarement. Mais lorsque j'interroge ma mémoire, les souvenirs me reviennent ; souvent sous forme d'images, d'instantanés. Parfois une odeur, une luminosité, un evènement particulier. Comme un souvenir en somme.

Celle qui revient souvent , dans mon esprit , c'est ma grande soeur. Actuellement agée de 28 ans, mère de deux enfants, je (anacoluthe) ne puis m'empêcher de la revoir à 12 ans, avec cette voix et ce visage. C'est ptet ça qui fait qu'on est frères et soeurs, unis jusqu'à la mort. J'envisage beaucoup moins les souvenirs concernant ma cadette dans cette perspective : trop proche, moins marquant.

Vous rappelez vous - peut être suis je le seul ?- cette eternelle dichotomie qui semblait durer des siècles ? Je m'explique.

La vie de l'enfance, cette promiscuité avec le frangin ou la frangine, cet ennui si fréquent, ce papier peint, la baignoire hostile, les escaliers dangereux, le lit trop chaud ; je pense à ce bloc d'existence absolument monolithique, pour lequel il suffit de se rappeler un instant pour tout faire ressurgir.

Et bien ce bloc, je le sépare en deux, tout bien refléchi.

Je me rappelle distinctement deux mondes :

Le monde de la chambre ; une chambre pas assez éloignée de l'Ennemi. Si l'Ennemi est l'ainé, vous êtes dans la merde ; pas de quartier ; des chamailleries incessantes, qui bien souvent n'émanent que de l'ennui, et d'un trop plein d'énergie à évacuer. Il s'est passé tant d'évènements dans le monde de la chambre, tant de drames. Tant d'activité, frénetique et stérile. C'est le lieu de l'apprentissage de tout, moins la civilisation.

Le monde de la table ; plus solennel, on y va deux-trois fois par jour, c'est un rituel de base incontournable. On assiste à l'alliance des ennemis de la chambre qui font bloc, pour une veritable union sacrée, face à l'Ennemi tout puissant : les parents.

La table est en lieu étrange et récurrent comme la chambre. Il se présente sous un aspect plus sécurisant mais méfiance ! On est ni à l'abri d'une tarte ni d'une trahison de l'allié de circonstance.

Ce monde, cette zone. C'est un truchement entre le monde enfantin, qui se confond plus ou moins avec celui de la chambre, et le monde des adultes, dont on ne prend conscience que bien plus tard, rétrospectivement. Le monde des adultes est matérialisé ici par les engueulades des parents, les discussions sur le boulot, les infos ou le sport à la télé, les jugements des adultes. Parfois, des allusions les plus vagues possibles sur des sujets durs, ou  secrets, dont on comprend tout de même qu'elles visent à nous laisser dans l'ignorance. Les premiers contacts avec le monde des adultes, c'est cette curiosité inassouvie. C'est aussi ça, un peu, le monde de la Table.

L'ecole , c'est tout à fait différent : aussi cruelle qu'elle ait pu être, ou qu'elle puisse être, elle ne me laisse pas cette trace indélébile dans mon esprit. Cette espèce de gout amer, ou aigre doux, c'est difficile à définir. C'est à dire que sa posterité est la somme d'excellents et de très mauvais souvenirs.

L'enfance, pour moi, fut ce balancement régulier, inarrêtable, implacable. J'étais tantôt poussé vers la Table, tantôt trimballé vers la Chambre. Irrésistiblement aspiré, j'étais désarmé, impuissant, nu, et voguait sans cesse ni résistance aucune entre les deux rives. Je n'avais pas vraiment conscience de l'emprisonnement que c'était. Je n'avais conscience de n'être jamais ou rarement enthousiaste, confiant, réellement joyeux.  Je ne crois pas que l'enfance est une période heureuse. Je me souviens de l'ennui , de la peur, de l'absence d'envie, d'une ataraxie suspecte maintenant que je l'observe. Je me rememore une angoisse sourde bruit de fond. Je me rappelle cet étrange zombie sans volonté ni soif de lutte que j'étais, sans la moindre nostalgie, ressentant une petite blessure qui cicatrise mal, et s'ouvre sitôt qu'on la gratte.

Je songe aux limbes, situées à entre les deux mondes,sans qu'elles ne les touchent, dans lesquelles j'errais certes, mais dans lesquelles je trouvais une paix certaine : on parle souvent d'évasion, de voyage, dans ces cas là. Et bien je n'ai pas le souvenir d'avoir, depuis, été aussi pleinement déconnecté du monde que durant ces heures que je passais à rêvasser, à imaginer d'autres mondes -encore des mondes-. Et je comprends à quel point j'étais singulier, et à quel point je ne le serais plus.

Et une fois encore, puisque je ne peux pas faire autrement, je me rappelle ces deux mondes, ces deux mondes de la guerre, où je n'étais pas en sécurité, où je perdais toujours. Et je n'y pense plus.

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Commentaires
C
jai redécouvert le sens de anacoluthe et ataraxie, merci!sinon j'approuve chifoumi sur les mondes, bien qua mon avis y'ait dautres bulles plus temporelles ou spatiales, (zeugma)et (zébulon) dans un bateau
M
tiens, c pas banal comme texte je trouve...jtavai rarement (voir jamais???) entendu parler de ton enfance en fait, ca doit etre pr ca. t'as kan meme bien de la chance avec ta frangine, mine de rien moi personne pourra jamais comprendre parfaitement c souvenirs la. enfin personne m'a enmerdé à cette période au moins!<br /> bisous chandelle<br /> porte toi bien
Lagl Land
  • Je suis une bande de jeunes, à moi tout seul, je suis une bande de jeunes : Jeum Fenlagl. Homme pressé de ne rien faire ; oppressé de la procrastination. Qui veut de moi et des miettes de mon cerveau ? Qui veut entrer dans la toile de mon réseau ?
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